Vendredi 7 mars 2014
Le Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec, le MÉPACQ, prend la parole aujourd’hui afin de dénoncer la montée de l’intolérance et la banalisation de comportements ouvertement sexistes, racistes et homophobes.
Le MÉPACQ, un des plus anciens regroupement d’organismes communautaires au Québec, représente plus de 300 groupes pratiquant l’éducation populaire partout au Québec. Il a jusqu’à maintenant choisi de ne pas commenter le contenu du projet de Charte des valeurs. Ce n’est d’ailleurs pas l’objet de cette lettre.
Il existe cependant des sujets sur lesquels nous ne pouvons pas nous taire. Depuis plusieurs mois, le projet de Charte des valeurs québécoises semble avoir participé à une progression de l’intolérance et de la violence. Cette dégradation du climat social est marquée par une augmentation d’incidents violents visant d’abord les femmes et les minorités sexuelles et ethniques.
Le MÉPACQ condamne avec force cette montée de l’intolérance qui porte atteinte aux droits fondamentaux. Nous dénonçons également l’inaction des autorités face à des incidents haineux, ainsi qu’une forte tendance à amoindrir leurs importances. En quelques mois, il est devenu tolérable, voire acceptable d’émettre certains commentaires méprisants envers des groupes opprimés, de les invectiver dans la rue, même d’émettre des menaces. Et tout cela sans que le gouvernement du Québec ne condamne la violence, sans qu’il ne lance un appelle au calme. Est-ce l’électoralisme qui pousse le gouvernement à rester silencieux ?
L’augmentation de l’intolérance n’est pas l’effet uniquement du projet de Charte. Elle n’est ni nouvelle, ni spécifique au Québec. Partout à travers le monde, on remarque une montée de la xénophobie, de l’homophobie et de l’anti-féminisme. L’histoire se répète. Alors que les riches de la planète se sortent indemnes d’une crise économique dont les effets perdurent, plusieurs sociétés font face à des déchirements sociaux qui laissent la porte grande ouverte à une poussée de la droite ultra-conservatrice. La montée récente de mouvements d’extrême-droite en est la triste démonstration. Si cette idée donne froid dans le dos, il ne faut surtout pas faire l’erreur de penser que ce genre de chose n’arrive pas chez nous.
Il est plus que jamais nécessaire de réaffirmer le modèle de société que nous souhaitons afin de contrer celui qui multiplie les oppressions et qui incite à la peur des autres. Le MEPACQ fait le choix de répondre par l’action collective, en pratiquant l’éducation populaire. Nous cherchons à favoriser la prise de conscience par les citoyennes et citoyens sur leurs propres conditions de vie, le tout dans le but de transformer la société de manière à faire émerger la solidarité et la justice sociale. Notre démarche est mise en œuvre collectivement par des gens qui ont la volonté de s’organiser ensemble afin que le pouvoir demeure entre les mains de la population.
Voici la vision qui ressort de ce processus de conscientisation et d’action sociale qui dure depuis plusieurs décennies : nous militons en faveur d’une société prônant des valeurs de paix (et non pas d’exploitation) entre les pays et entre les nations ; une société qui accueille les immigrant-e-s et permet leur plein épanouissement comme celui de tous et de toutes ; une société qui rejette catégoriquement le racisme, le sexisme et l’oppression ; une société qui prône le respect des collectivités et des individus peu importe la race, le sexe, la religion, l’orientation sexuelle, la condition physique, psychologique ou le statut économique.
Nous croyons qu’il est temps d’assumer collectivement la responsabilité de cette montée de l’intolérance et de rester les yeux grands ouverts devant elle. Nous devons refuser les comportements et déclarations racistes, sexistes ou xénophobes, qu’ils soient suscités ou non par les discussions entourant la Charte des valeurs. Devant l’inacceptable, continuons à construire un projet de société dans lequel la violence, l’intolérance et la discrimination n’ont pas leur place!